Mission rang E+/Un anneau pour les poutrer tous

Kyane se trouvait bien loin de sa guilde, dans un lieu inconnu pour elle mais c’était voulu par un besoin de s’isoler, de faire le point sur ce qu’elle avait fait jusqu’à présent et surtout, essayer de comprendre pourquoi elle n’avait pas recherché sa mère. Elle avait pris les moyens de transport qui s’offraient à elle, ne regardant pas les destinations mais prenant ceux qui étaient là, à la bonne heure, au bon moment et cette perégrination l’avait conduite ici. Apparemment, elle se trouvait dans un endroit assez perdu de Fiore Ouest, ses pas l’avaient menée jusqu’à cette forêt qui avait l’air assez immense et elle s’apprêtait à y pénétrer. Elle s’imaginait déjà assise sur un parterre de mousse, au pied d’un grand arbre, ou même allongée sur le dos pour contempler la canopée, enfin seule et tranquille pour réfléchir à tout ce qui lui encombrait l’esprit.

Alors même qu’elle allait passer de la pleine lumière à la pénombre du sous-bois, une quinzaine de créatures immondes surgirent d’on ne sait où et  entourèrent la jeune fille avec des sourires gogenards. C’était des sortes d’humains complètement déformés, avec d’énormes oreilles pointues, la peau grisâtres, le crâne presque chauve, des dents jaunes et pourrissantes, mais le plus effrayant était leurs yeux rouges vifs. Sans un mot, ils s’avancèrent vers elle avec pour intention évidente de l’attaquer, poussant de grognements qui semblait ête leur myen de communiquer.
Dans un moment pareil, la jeune fille ne pensa pas un instant qu’ils ne parlaient sûrement pas la même langue et se lança dans une plaidoirie afin de sauver sa peau.  

- Je n’ai pas d’argent, je n’ai rien à vous donner à part des sous-vêtements de rechange et ils ne vous iraient pas. Et si c’est pour abuser de moi, sachez que je porte en moi une très vilaine maladie qui se transmet par l’entrejambe.

N’importe quoi pour les faire fuir, pourtant, loin de se décourager, les affreux se faisaient plus menaçants, levant leurs armes comme pour lui en assener des coups. Kyane mis ses bras devant son visage pour se protéger, geste futile mais elle ne pouvait pas fuir et s’attendait à essayer les coups qui allait pleuvoir sur elle.
Soudain, un bruit de galop interrompit l’avancée des barbares vers elle et un cavalier sur un cheval noir ébène fit son apparition. Il portait une épée dans chacune de ses mains et les faisait tournoyer à en fouetter les méchant gris qui déguerpirent rapidement non sans adresser des gestes de colère au cavalier.

- Et bien, vous arrivez au bon moment, merci !

- Ils sont plus bêtes que méchants, tu ne crains plus rien. Je suppose que tu es Gamil, le nain qui vient mener le Précieux jusqu’à la grande montagne, je vais t’accompagner.

Kyane ne sut que répondre,  ce cavalier devait avoir un sérieux problème de vue pour la confondre avec un nain, s’en était même vexant, elle n’était pas si petite que celà. Certes il était très grand, il faisait bien plus de 2 mètres, mais tout de même ! Une nouvelle intervention de l’homme vint stopper net la remarque qu’elle voulait lui faire concernant sa confusion.

-Au fait, je suis le Sieur Grandebourse, pour te servir.

Elle n’allait pas vérifier s’il méritait son nom mais en tous les cas, il était clair qu’il le portait certainement mieux que Grandevue.

Kyane ne savait pas trop comment dire au cavalier qu’il se trompait, qu’elle n’avait rien à voir avec le nain dont il parlait, mais le pauvre avait déjà un nom pas facile à assumer, elle n’allait pas en plus lui faire comprendre qu’il avait un sacré problème de vue. Et puis, après cette attaque surprise qu’elle venait de subir, il était quand même rassurant pour elle d’être accompagnée par ce Sire Grandebourse.
Cependant, il lui fallait en savoir plus sur celui qu’elle était sensée être afin de ne pas commettre d’erreurs.

-J’aimerais quand même être sûre que vous êtes bien celui que vous prétendez être, on n’est jamais trop prudent, que savez-vous exactement sur moi et le Précieux ?

C’était quand même osé de sa part de retourner ainsi la situation, mais la jeune fille ne manquait pas d’audace et la suite lui donna raison.

Ah oui, bien sûr, tu es prudent et je t’en félicite. Tu es le nain chargé de porter un anneau très important dans la montagne, on t’a choisi parce que tu es le plus rusé. Cependant, je ne peux t’accompagner plus loin que la rivière, et tu sais très bien pourquoi.

- Oui je le sais...

Sans doute était-il aquaphobe, en plus d’être myope, ou invité quelque part, jamais elle ne le saurait.

Ainsi donc, ils marchèrent côte à côte, le plus souvent en silence, Kyane ayant la crainte de se révéler si elle en disait trop. Puis, quand la rivière se présenta, il retira de son doigt un vieil anneau qui semblait de fer blanc et le lui donna.

-Tiens, porte-le jusqu’au bout et méfie-toi de ceux qui pourraient te détourner de ton chemin pour s’en emparer, ils sont nombreux. Ils ne peuvent pas le prendre par la violence, ils savent que le Precieux s’autodétruirait dans ce cas, mais ils vont chercher à t’embrouiller, ne cède pas.  

- Ah non, mais je...attendez...je ne suis pas...

Tout ce qu’elle voyait à présent du cavalier, était un cheval qui s’éloignait a grande vitesse. Elle observa l’anneau, une vulgaire pacotille bon marché, et se dit qu’après tout, elle n’était pas obligée de l’amener plus loin simplement parce qu’un certain cavalier avec un nom à coucher dehors avait une imagination débordante.
La jeune fille n’avait pas l’intention d’aller plus avant, l’endroit était propice au repos et à la méditation, elle avisa donc un endroit confortable pour s’y installer. Dans sa main, l’anneau tournait et retournait, elle se demandait si vraiment il avait une si grande importance, si les affreux gris qui en voulaient à sa vie  l’avaient aussi prise pour le convoyeur du Précieux, auquel cas il était effectivement de grande valeur. Elle ne savait que faire, le cavalier pouvait avoir tout inventé mais il pouvait tout aussi bien avoir placé sa confiance en elle.

Un craquement de branchage se fit entendre, Kyane rangea rapidement l’anneau dans sa poche et guetta autour d’elle. Un groupe d’individus qu’elle reconnut comme des elfes à leurs oreilles pointues, se trouvait à présent à ses côtés. Elle se leva prestement et les salua. Le plus âgé d’entre eux, sans doute leur chef, prit alors la parole, tandis que les autres semblaient prêts à décocher des flèches des arcs qu’ils tenaient fermement en mains.

-Inutile de nier, nous t’avons vue avec Grandebourse le mal nommé, tu as donc l’anneau. Nous te proposons de le porter à ta place et ainsi d’être libre d’agir comme bon le semble sans plus te préoccuper de cette mission, qu’en dis-tu ?

-Ne l’écoute pas, il veut te le voler, nous sommes les mieux placés pour mener ce merveilleux anneau dans la montagne.

Ces mots venaient d’un vieil homme à la barbe et chevelure blanches, qui s’avançait vers elle, accompagné d’une dizaine de ces clones, qui lui souriaient découvrant leur dentition anarchique.

Kyane était donc fixée, le cavalier n’était pas un aliéné, il lui avait assené une sacrée responsabilité et en plus, l’anneau qu’elle cachait était ardemment convoité.

Les deux clans se toisaient avec dédain, les elfes n’appréciaient certainement pas l’intervention des vieux sages et ces derniers leur en voulaient d’être arrivés avant eux. Cette animosité aurait pu arranger Kyane si elle avait débouché sur une confrontation entre les deux camps, ainsi aurait-elle pu partir discrètement sans se préoccuper de ruser pour se débarrasser d’eux. Mais ils avaient trop à coeur de détenir ce fameux anneau et ignorant ceux qui leur faisaient concurrence, chacun tentait de persuader la jeune fille qu’il était celui qui devait détenir l’objet précieux.  

-Allons, nous sommes la sagesse, nous connaissons les pouvoirs de cet anneau mais aussi le mal qu’il peut faire, nous ne voulons pas qu’il tombent en de mauvaises mains, nous voulons t’en protéger jeune demoiselle, tu dois nous le confier.

-Pourquoi ferait-elle confiance en de vieux fous alors que nous sommes le peuple de la forêt, le cavalier l’a conduite ici pour qu’elle nous rencontre, il sait que nous sommes le mieux placés pour prendre soin de l’anneau  

-Absolument pas, le cavalier ne veut pas qu’elle vous le donne, sinon il l’aurait fait lui-même, vous allez mal l’utiliser, vous vous moquez d’elle, vous....

-Vous voulez profiter de sa crédulité en l’amadouant par vos belles paroles, vous voulez..

- Non mais oh ça suffit ! Elle, elle, elle...je suis là, j’existe, vous me prenez pour un arbre, ou quoi ?

La jeune fille était exaspérée, ils parlaient d’elle comme si c’était la dernière des idiotes, l’ignorant de belle manière, réglant leur compte et tentant de s’approprier l’anneau par une joute verbale dont elle était le sujet principal.

- Personne n’aura l’anneau, je le garde et c’est tout.

Elle regretta aussitôt ses paroles. En effet, les elfes se firent soudain très menaçants, levant les arcs dans sa direction, les vieux levèrent également leurs bâtons de marche qui avaient l’air d’être plus que de simples bâtons, sans doute magiques. Certes le Précieux se détruirait s’ils lui prenaient par la violence mais ils pouvaient très bien avoir des arguments pour la contraindre à leur donner sagement, comme la séquestrer, la torturer ou l’affamer.
Sa seule chance serait qu’ils se battent entre eux, mais ils semblaient trop intelligents pour perdre ainsi l’occasion d’avoir l’anneau. D’un autre côté, ce qui rassurait Kyane, c’était que jamais ils ne pourraient coopérer pour obtenir l’objet, donc elle n’aurait pas à lutter contre tous en même temps, quoiqu’en y refléchssant bien, il se pourrait fort qu...

-Alors, on n’attend pas Patrick ? Il y a une réunion, et ça parle de l’anneau sans nous c’est pas bien, ça ! Mademoiselle je vous salue !

L’homme qui venait ainsi fièrement de montrer sa présence était l’un des chevaliers qui sans doute étaient cachés jusqu’alors à les épier et trouvaient que le moment était venu de se dévoiler. Ils n’étaient pas nombreux, six en tout, mais les épées qu’il portaient n’avaient rien de gadgets.

-Tiens, toi, pourquoi donc viens-tu si loin de chez toi, tu t’es perdu en cherchant ton lac ?

Décidément, ils se connaissaient tous ! Kyane soupira, y en aurait-il encore beaucoup pour venir marchander avec elle ?

Qui devait-elle croire ? Ne serait-il pas plus sage de confier l’anneau afin de se débarrasser de cette responsabilité ? Quelque soit le camp qu’elle choisirait, elle serait ainsi libérée de ce fardeau et ensuite à eux de s’entretuer s’ils le désiraient, cela ne la concernerait plus.
L’autre solution était de poursuivre la mission confiée par le cavalier mais alors elle serait menacée en permanence par les trois groupes qui ne manqueraient pas de mettre tout en oeuvre pour récupérer ce satané anneau.
Elle soupira. Sa décision était prise depuis bien longtemps mais elle continuait d’envisager l’autre option, comme si cela pouvait la faire changer d’avis mais dans sa tête, c’était limpide, inutile de tergiverser.

Elle contourna les elfes qui continuaient de palabrer avec les autres, puis se mit en marche, serrant le Précieux dans sa main, au fond de sa poche.


-Hé, où vas tu ainsi ?  

La jeune fille ne se retourna même pas, poursuivant son chemin mais elle n’avait pas fait deux pas de plus que déjà elfes, chevaliers et vieux sages l’encerclaient.

-Ce n’est pas prudent pour une demoiselle seule de traîner dans cette forêt, tu risques de faire de bien mauvaises rencontres.

- Je ne risque pas en faire de pires que jusqu’à présent

Elle passa entre les chevaux, s’obstinant à continuer sa route mais les trois troupes étaient tenaces et ne la lâchaient pas mais tant qu’ils ne s’en prenaient pas directement à elle, cela ne la gênait pas. Ils n’arrêtaient pas de s’invectiver, chacun mettant en avant des raisons plus ou moins farfelues de se voir attribuer l’anneau, tantôt menacants, tantôt mielleux, mais aucun ne céda.

Soudain, les elfes l’agrippèrent pour la hisser sur un de leurs chevaux. Les cavaliers réagirent aussitôt, prêts à utiliser leurs épées pour taillader les kidnappeurs et Kyane se retrouva de nouveau libre de ses mouvements.

-Il fallait bien qu’ils tentent quelque chose, nous sommes arrivés à la ligne !

- La ligne ?

Ce furent les vieux sages qui prirent alors la parole pour lui expliquer que les elfes ne pouvaient pas aller au delà de la rangée d’arbres qu’ils venaient de dépasser sous peine d’être ensorcelés. D’ailleurs, seuls les vieux et les chevaliers la suivait encore, elle put voir les elfes qui les regardaient s’éloigner avec mépris.
Elle se tourna alors vers les deux camps restant.

- Et vous, où se trouve votre ligne ?

-Ne t’inquiète surtout pas, nous pouvons t’accompagner jusqu’au bout, n’est-ce pas, les ancêtres ?

Les sages acquiescèrent, non sans rajouter que si elle leur confiait l’anneau, elle serait ainsi plus tranquille et pourrait revenir chez elle.

Kyane en avait plus que marre de ses accompagnateurs forcés, ils n’arrêtaient pas de tenter de l’amadouer avec des promesses douteuses et des argumentations emberlificotées Ils se faisaient même menaçants, indirectement mais par des insinuations.  

-Attention à bien regarder où tu marches, un accident est vite arrivé, ce serait quand même dommage que tu te casses une jambe et que tu sois immobilisée.

-Elle a plus à se méfier des éléments, la foudre peut tomber d’un seul coup sans prévenir.  

Le vieux brandissait son bâton vers le ciel comme pour appuyer ses dires mais la jeune fille se doutait bien que si foudre il y avait, elle viendrait sûrement de son bâton.
Tant qu’ils étaient deux groupes opposés, elle savait qu’elle n’avait rien à craindre, si l’un agissait, l’autre lui viendrait en aide pour ne pas que l’anneau ne lui échappe. Tout ce qu’elle avait à faire était de trouver un moyen de les faire partir avant d’arriver à sa destination, parce qu’une fois parvenus à la montagne, il tenteraient tout dans un dernier espoir, mais pour l’instant, elle ne voyait pas trop comment faire.
La montagne, justement, elle commençait à apercevoir ses plus grands sommets maintenant que les arbres commençaient à se clairsemer et que la forêt se faisait moins dense. Bientôt ils parviendraient au but final de cette charmante promenade et il faudrait ruser.

Au détour d’un grand virage, ils furent stoppés net. Un groupe d’une dizaine de nains leur faisaient face, grimaçants, armés de gourdins. Kyane n’attendit pas qu’ils se présentent, ni qu’ils ne disent la raison de leur présence là, elle profita de l’occasion, qui était trop bonne et courut vers les nabots.

-AU SECOURS...Aidez-moi ! Ces gens que vous voyez là, les chevaliers, m’ont enlevée de ma famille et me conduisent de force avec eux pour me sacrifier. Il veulent mon sang de vierge pour donner force à leur armée afin de combattre des nains, d’après ce qu’ils m’ont dit.. Ne laissez pas faire ça, je suis sûre que ces nains dont ils parlent, il s’agit de vous.

Il n’en fallut pas plus aux nains pour réagir et s’élancer avec brutalité vers les chevaliers. Les assaillants étaient certes petits mais agiles et costauds, et quand les chevaliers virent deux des leurs complètement meurtris alors que les nains continuaient leur combats farouchement, ils renoncèrent à rester plus longtemps et Kyane les vit disparaître dans un grand bruit de galop.

Pendant ce temps, les vieux sages n’avaient pas bougé et se tenaient silencieux, attendant la suite des évènements et se félicitant intérieurement du départ de leurs concurrents. Ils s’avancèent alors vers les nains, les remerciant d’avoir sauvé cette "pauvre demoiselle", eux-mêmes étant menacés par les chevaliers et n’ayant rien pu faire pour la délivrer.

-Du calme pépé, arrête avec ton histoire à dormir debout, on a fait ça pour l’anneau alors ne t’en mêle pas !  

-L’anneau, quel anneau ?

-Bla bla bla...mais tu crois que les nains sont aussi idiots que ça ? Tu as l’anneau, on t’a sauvée, même si tu n’as jamais vraiment été en danger, et maintenant aboule le Précieux.  

-Surtout pas à vous, ne l’écoute pas, jeune demoiselle, ils vont mal l’utiliser, ils vont en faire une arme. Confie-nous l’objet, aie confiance en notre sagesse.

-Je...hum...êtes -vous aussi sages que vous le prétendez ? Je vais vous poser une question, si vous trouvez la reponse je refléchirais à votre proposition, dans le cas contraire, vous n’avez plus rien à faire ici

Acculés, les vieux n’avaient plus qu’à accepter, d’autant qu’ils connaissaient toutes les réponses à toutes les questions, ils ne craignaient donc rien.

Elle apparaît au matin, disparaît à midi et n’est pas présente le soir, mais revient la nuit. Qui est-ce ?

Les vieux se regroupèrent, échangeant leurs idées en chuchotant. Puis, le chef revint avec un grand sourire, il avait la solution.

-Pas là le midi ni le soir mais arrive la nuit, la lune bien sûr, mais tu t’es trompée, tu as dit qu’elle apparaît le matin et non qu’elle disparaît  

-Je ne me suis pas trompée, il ne s’agit pas de la lune.

Après presque une heure d’une nouvelle réflexion commune, les sages s’avouèrent vaincus, ils n’avaient pas la solution. Ils attrapèrent donc leur bâton et, sans mot dire, reprirent le chemin du retour. Alors qu’ils n’étaient plus que des ombres rapetissantes, Kyane leur cria en riant.

- NNNNNNN !

Se retournant pour poursuivre son chemin, la jeune fille vit face à elle le groupe de nains avec leurs sourires goguenards.

-Bon, tu as bien joué ? Maintenant, aboule l’anneau !

-Ouaisss, donne, donne, donne !

- Cet anneau ira nulle part sans moi, je le conduirais à la montagne.

Elle ne savait d’ailleurs pas où exactement il fallait le livrer, Grandebourse lui avait dit la montagne sans plus de précision, elle espérait seulement que quelqu’un l’y attendrait.
En attendant, le but se rapprochait mais elle n’était malheureusement pas seule, et les nains ne semblaient pas enclins à la lâcher. Ils la suivaient, comme tous les autres avant eux, mais Kyane sentait que eux n’hésiteraient pas à tenter de lui dérober le Précieux dès qu’elle relâcherait son attention. Rien ni personne ne les empêchaient de la forcer par diverses moyens à leur donner ce qu’ils désiraient et sans doute mettaient-ils déjà un plan d’action en place.

Le pied de la montagne s’annonçait par des rochers qui remplaçaient peu à peu la terre de la forêt, il lui fallait agir tant qu’il restait des arbres autour d’eux car elle avait une idée. Elle s’arrêta, faisant mine d’être essouflée et de se reposer un peu, puis anoinça qu’elle allait se soulager d’un besoin pressant derrière un buisson. Alors, elle concentra tout l’air qu’il lui était possible et fit naître une tempête. Non que sa faible puissance permettrait de soulever les nains et de les éjecter au loin, comme cela devrait se faire si elle était en pleine possession de ses pouvoirs, mais le fort vent balaya toutes les feuilles et les branches qui tournoyèrent violemment autour des nains. Ces derniers s’accroupirent, les bras croisés au dessus de leur tête enfouie contre leurs cuisses, pour se protéger de tout ce qui pouvait les atteindre.

Kyane n’hésita pas et se mit à courir le plus rapidement possible vers la montagne. Sur le flanc rocheux, elle trouva une faille assez mince pour s’y glisser à l’intérieur, elle se fit immobile et silencieuse puis attendit.
Quelques longues minutes plus tard, un bruit de course se fit entendre et elle put voir débouler les nains qui furetaient partout.

-Pas possible, elle n’a pas pu disparaître comme ça.

-Elle est très rapide, plus que nous.

-A mon avis, IL l’a trouvée et l’anneau est déjà en SA possession.

-Sûrement...on n’a plus qu’à rentrer.

Une fois les nains hors de vue, Kyane sortit de sa cachette en soupirant, mais le plus difficile restait à faire : trouver où porter cet affreux anneau.
Elle marcha donc vers le petit sentier qui grimpait jusqu’au sommet de la montagne, l’ascension promettait d’être difficile tant le trajet était long. Elle fit ainsi deux bons kilomètres de montée quand un grand oiseau vint se poser juste devant ses pieds. Il était majestueux, un énorme rapace aux yeux dorés, et qui avait autour de sa patte gauche un anneau identique à celui qu’elle avait. Il la salua.
En soi, un oiseau qui parle aurait pu intriguer Kyane, mais elle avait appris que dans ce monde, tout était possible.

-Bonjour porteur de l’anneau, je suis celui que tu cherches. Les étoiles finissent toujours par mourir.

Kyane reconnut là le code que Grandebourse lui avait donné, de manière à ce qu’elle remettre l’anneau à celui qui devait l’avoir. Elle attrapa donc le Précieux et l’enfila autour de la patte vide que l’oiseau lui tendait.

- Quel pouvoir a donc cet anneau, il va vous transformer ? Vous donner plus de puissance ?

-Non, du tout, simplement un seul anneau à mes pattes, ce n’est pas joli, pas symétrique, alors que deux, regarde donc comme je suis élégant.

Sur ces mots, l’oiseau s’envola sans plus de remerciements, laissant Kyane hébétée. Elle avait parcouru tout ce chemin, avait été sous la menace de troupes de méchants gris chauves, d’elfes orgueilleux, de vieux rabats-joie, de chevaliers antipathiques et de nains rustauds, simplement pour que les pattes d’un oiseau soient décorées de manière harmonieuse ?

Longtemps, pendant des heues, on entendit une voix grommeler dans la montagne, puis dans la forêt voisine.

-Et bien, la prochaine fois que je rencontre un cavalier, je l’ignore, c’est promis....J’aurais du m’en douter, avec un nom pareil...Et les elfes ? J’aurais du leur donner l’anneau, ou aux vieux....Mais pourquoi je suis venue ici moi ? Pourquoi ? ....L’anneau, j’aurais du l’enterrer tiens, et puis repartir...Si j’avais su....